La bonté...


"La bonté, c’est arriver à sortir de soi, du moins un peu"

Voici un nouvel article lu cet été, le 3 Août dans le JDD, qui parle des bienfaits de la bonté....
C'est magique, et tellement bon pour bien commencer cette rentrée !!

Emmanuel Carrère , écrivain, est interviewé ici par Anne-Laure Barret.

Cet auteur a écrit : "D’autres vies que la mienne" (Editions POL), c'est vraiment un des best-seller de l’été qui décrit les vertus de la gentillesse.


La bonté c'est pour l'auteur, un signe d’intelligence et, pourquoi pas, une "politique de vie"...

Un livre à lire sans aucune modération !!



Votre dernier roman a pour point de départ votre rencontre avec le juge Etienne Rigal, un héros du quotidien chargé de dossiers de surendettement. Est-ce la gentillesse de ce personnage qui émeut tant les lecteurs ?

Etienne, qui ne se veut ni un saint ni un sage, qui peut se montrer à la fois bienveillant et âpre, refuserait cette étiquette de gentil.
Moi j’aurais tendance à penser que oui, mais cela dépend de ce que l’on entend par gentillesse.
Le mot est entaché de mièvrerie, d’une espèce de douceur un peu molle.
Mais je l’entends dans le sens, exigeant et maximaliste, qu’on donnait autrefois au mot "charité".
Peut-être est-il plus simple de parler de bonté.



La bonté de ce magistrat vous a ébranlé. Comment peut-on la définir?

La bonté, c’est arriver à sortir de soi, au moins un peu, à se soucier d’autrui, à établir de vrais liens.
Au contact d’Etienne, j’ai appris que pour être vraiment présent à autrui, il fallait consentir à être soi.
Si on se fuit ou se perd dans l’autre, on ne l’aide pas et on ne s’aide pas non plus soi-même.

Il faut donc aller suffisamment bien pour être ouvert ?…

Ce n’est pas seulement aller bien, c’est savoir que tout ce qu’il peut y avoir comme rapport avec autrui est enraciné dans le rapport à soi.
Quand Etienne était juge d’instruction, il se retrouvait face à des gens cassés, bousillés.
Pour les écouter, il s’enracinait dans une espèce de calme, fondé sur sa propre expérience de la souffrance et du dégoût de soi.
En écrivant ce livre, j’avais noté une phrase du philosophe Emmanuel Levinas: "Le plus court chemin vers soi passe par autrui. »
Je me suis très vite rendu compte qu’elle était réversible : « Le plus court chemin vers autrui passe par soi."

Le malheur enseigne-t-il la gentillesse ?

Quand on dit cela à Etienne, il répond que non, le malheur ne sert à rien.
Moi qui suis sans doute plus chrétien que lui, j’ai tendance à penser qu’avoir traversé de très grandes épreuves rend plus présent à soi-même et aux autres.

Vous êtes vous-même au cœur de vos livres. Comment l’Emmanuel Carrère plutôt antipathique du Roman russe s’est-il transformé en un type plein d’empathie ?

Dans ma vie, et par conséquent dans les livres que j’ai écrits précédemment, il y avait quelque chose qui n’était pas du tout du côté de la méchanceté mais de la névrose, oui.
La névrose limite énormément. Elle enferme.
Quand elle perd un peu de son emprise, on s’ouvre plus facilement.
Au fond, il y a peu de méchants actifs, libérés et conscients.
Je crois que la méchanceté est une forme du malheur, liée à la peur, à la paralysie, à l’enfermement en soi.

Les gentils seraient plus heureux que les méchants ?

La bonté est une politique de vie plus efficace, cela me paraît évident.



La bonté n’est-elle pas la forme suprême du narcissisme?
En étant agréable, on est aimé de tous…


Je n’y avais jamais pensé mais, si c’est le cas, pourquoi pas ?
Je ne crois pas à la pureté des motifs.
Prendre conscience qu’on a intérêt à être bon – c’est-à-dire, simplement, à tenir compte du fait que l’autre existe –, c’est un début.

On croit souvent que la gentillesse est un signe de faiblesse.
Vous semblez penser au contraire que c’est une vertu…


Ce n’est pas une vertu, c’est la plus grande des vertus et le signe de la plus grande intelligence.
A la fin de sa longue vie, après avoir traversé tout le premier siècle du christianisme, l’apôtre Jean ne répétait plus qu’une seule chose à ses disciples :
« Mes petits enfants, essayez d’être un peu plus gentils. »
Que toute l’expérience morale et spirituelle d’un homme qui était un des plus grands mystiques de tous les temps se résume à ce conseil apparemment simplet, de ceux que tous les parents donnent ou devraient donner à leurs enfants, je trouve ça magnifique !.

Allez, au plaisir de vous lire...

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