Le bâillement ...


Je m’excuse à l'avance pour les bâillements que va provoquer ce billet, mais.... comme c'est bon !!!




Étymologiquement, le verbe "bâiller" vient du vieux français "baailler" dont l'origine latine bataculare (formé sur batare ou badare) signifie être béant, ouvert .
C'est pour cela qu'une robe, un corsage ou une porte bâille, bien que ne sachant ni respirer ni dormir.
Le langage populaire connaît les locutions : "bâiller comme une carpe", "comme une huître", "bâiller foin en corne", "bâiller à s'en décrocher la mâchoire", "Bâiller sa vie" ...

Qu'est-ce que le bâillement ?

Le bâillement est un réflexe qui existe non seulement chez l’être humain mais aussi chez les mammifères, les reptiles et les oiseaux.
Par conséquent, tous les vertébrés terrestres baillent, sauf la girafe, mais cette anomalie s’explique très bien par l’absence de rythme biologique chez cet animal, qui dort à peine et de manière très sporadique.




Ce phénomène involontaire (même si l’on peut aussi le provoquer) se décompose en trois phases, durant 5 à 10 secondes, toujours dans la même séquence :

une inspiration ample, lente et très profonde, avec la bouche largement ouverte
(Elle ne peut pas se faire par le nez pour bâiller, ni dents occluses).

un temps d’apnée qui maintient le diaphragme étiré et les poumons ouverts
(l'expansion du pharynx peut quadrupler son diamètre par rapport au repos) souvent associé à des mouvements d'étirements des membres et une occlusion des yeux.

une expiration passive bruyante et lente chez l'homme, rapide chez les primates, accompagnée d'une relaxation de tous les muscles concernés. La bouche se referme et le larynx reprend sa place initiale. Un relâchement qui apporte une sensation de détente et de bien-être



Même s’il peut sembler banal, le bâillement n'est pas une simple ouverture de la bouche, mais, un mouvement d'étirement musculaire généralisé, des muscles respiratoires (diaphragme, intercostaux, scalènes), des muscles de la face et du cou.
Très curieusement, il associe une contraction simultanée de muscles antagonistes, tels les muscles masticateurs (fermeture de la bouche) et les muscles digastriques qui ont l'action prédominante, permettant la large ouverture de la bouche.

Tous les muscles du faciès interviennent, donnant de multiples mimiques, sans ordre précis; les sécrétions lacrymales sont brièvement gênées dans leur écoulement par la compression des canaux lacrymaux, une larme perle alors à la paupière.
Un peu de salive déborde la lèvre largement éversée bouche grande ouverte.

Il survient souvent par salves de deux ou trois cycles accompagnées de mouvements d'étirement du tronc en hyperlordose, des membres en hyperextension chez les bipèdes, essentiellement au sortir du sommeil.
Chez les quadrupèdes le dos peut se déformer en dos rond (carnivores - chats, chiens,...).
Les primates non humains bâillent le plus souvent assis, parfois allongés et même exceptionnellement en marchant.
A l'acmé du bâillement, on peut observer soit à un haussement d'épaules (mangabés), soit à une contraction des muscles de la nuque dessinant une "bosse de zébu" (macaques).
Le port de la tête se fait en hyperextension cervicale à l'inspiration, suivie d'une flexion à l'expiration.
Il s'associe à des émissions sonores de modulations différentes suivant la phase et les types de bâillements.
Le bâillement peut apparaître simultanément à une urination, une défécation, une érection voire une vocalisation.



Quelles sont les causes du bâillement ?
Paradoxalement, le bâillement n’a pas vraiment été étudié depuis Hippocrate.
Ce qui remonte quand même à l’Antiquité !
Le père de la médecine incluait le baîllement dans sa grande théorie des humeurs.
Il pensait alors que ça fonctionnait comme une cheminée pour évacuer la chaleur de la fièvre !
Puis pendant plus de 2000 ans, jusque dans les années 80, plus rien.
Le bâillement ne devait pas être considéré comme digne d’être étudier.

Selon les scientifiques actuels, c’est encore assez obscure mais cela permettrait de marquer nos transitions comportementales.
Quand on passe du coucher au lever par exemple, quand on a faim ou au contraire après un bon repas et même chez la femme, lors du désir amoureux.
En fait, le bâillement serait un mécanisme de vigilance, une sorte d’alarme qui nous rappelle les phases clés de notre cycle biologique.
Et dans le cerveau, ce qui contrôle cette horloge biologique, c’est notre hypothalamus.



Cette envie irrépressible d’écarter les mâchoires pour prendre une grande inspiration exprimerait donc un besoin : besoin de sommeil, de détente ou de nourriture que notre corps nous fait savoir plus ou moins bruyamment.
Le bâillement survient en effet plus fréquemment quand on a faim, quand on est fatigué ou au moment de l'endormissement.
Le réveil est aussi propice à l'apparition de bâillements souvent associés à des étirements.
Bâiller est donc un signal qu’il faut savoir écouter.
Ce phénomène aide aussi notre corps tout entier à se relaxer : une forme de lâcher prise qui fait du bien !
Les activités répétitives et monotones favorisent l'apparition de bâillements répétés comme l'ont montré des études chez des travailleurs postés.
Lors de la conduite automobile, en particulier pour de grandes distances sur autoroute, la répétition des bâillements est un signal d'alarme pouvant prévenir le chauffeur du risque d'endormissement.
Des conditions d'environnement comme le confinement dans un local de dimensions réduites, la chaleur excessive, sont des facteurs majorant la fréquence des bâillements causés par l'ennui.
Greco et Baenninger ont établi que la fréquence des bâillements est élevée dans 4 situations de la vie quotidienne: lire, voyager dans un transport en commun, conduire, attendre.



Qui baille ???

Nous sommes tous des bailleurs, mais ....
Comme il existe de grands et de petits dormeurs, il existe des bâilleurs rares et des bâilleurs fréquents .
Il n'existe pas de différence entre les sexes (à la différence des primates non humains chez qui le bâillement est testostérone-dépendant).
Le bâillement apparait aussi lors des changements d'état de vigilance chez le prématuré.



La pratique de l'échographie a montré que le fœtus bâille pendant la vie intra-utérine.
La revue anglaise New Scientist du 10 avril 1999 rapporte un travail du centre de diagnostic prénatal de Signal Montain (Tennessee) où W. Blackburn et R. Roberts estiment que le bâillement, détecté dès la 12° semaine, constitue un élément essentiel au bon développement pulmonaire du fœtus.
Le bien être fœtal peut aussi être évalué par l'étude du bâillement fœtal.
Une augmentation de fréquence des bâillements est corrélée à une anémie fœtale et semble essayer de procurer une augmentation du retour veineux vers le cœur.

Pourquoi est-il bon de bâiller ? Le bâillement est généralement condamné par les règles de la bienséance : on ne bâille pas en public ou alors discrètement.
Pourtant, un vrai grand bâillement n’a pas son pareil pour nous détendre et nous aider à récupérer.

Pour profiter des effets anti-stress et anti-fatigue de ce phénomène, ne réfrénez plus vos bâillements, mais bâillez amplement !
Il est bon d’associer les bâillements à des étirements, surtout avant de s’endormir et le matin au réveil.
Il est également possible, et même recommandé, de provoquer des bâillements au cours de la journée, à chaque fois que l’on se sent stressé, trop ému ou fatigué.
C’est facile et surtout très efficace pour relâcher la pression.
Seul inconvénient (mineur) à cette méthode : le bâillement est contagieux !



La contagion du bailleur !!

Selon le dicton : "Un bon bâilleur en fait bâiller sept".

Cette "échopraxie" synonyme de "échokinésie" ou en termes plus simples : tendance spontanée à répéter ou imiter les mouvements d’une autre personne … n’apparait qu’à l’âge de 4/5 ans chez l’humain et chez seulement certains grands singes.

D’après Olivier Walusinski, médecin français spécialiste du bâillement, cette imitation serait liée à notre capacité à l’empathie, c’est à dire notre capacité à se mettre à la place des autres.
Là encore, tout se passe dans notre cerveau.
Les responsables de cette empathie : les neurones miroirs.
Ces neurones un peu particulier tirent leur nom de leur capacité à s’activer aussi bien pendant qu’on exécute une action que pendant qu’on observe quelqu’un l’exécuter.



Alors si vous n’avez pas encore baillé en lisant ces lignes, c’est que vous avez peut-être une personnalité schizoïde, encline à l’isolement social.
Au contraire, si vous n’avez pu vous empêcher de bâiller à gorge déployée, vous êtes sûrement quelqu’un de très sensible.

Pour clore ce billet, je vous invite à aller visiter le site d’Olivier Walusinski : www.baillement.com
Il est vraiment très complet et passionnant .

Dernière petite chose : on bâille en moyenne, dans toute sa vie, plus de 250 000 fois.

Allez, un bon bâillement pour vous détendre... et, au plaisir de vous lire !

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