Aîné, cadet… à chacun son chemin !

Voici un très bon papier de MARIE AUFFRET-PERICONE ( La Croix) illustrant le fait que notre environnement a une grande influence sur nos points forts !!!

Être le premier, le dernier ou «celui du milieu», ce n’est pas la même histoire…
Pour les spécialistes, le rang de naissance dans une fratrie influence les rôles, mais aussi les personnalités des enfants.
«Ma première est réservée, angoissée, déteste le changement.
Ma deuxième ne tient pas en place.
Mon troisième est charmeur, et il est difficile de le punir quand il fait une bêtise. »


Une charade ?
Non, trois frère et sœurs de 3 à 9 ans décrits par leur mère.
Un témoignage représentatif de ce que décrit Marc Sznajder, pédiatre et auteur de "Les Aînés et les Cadets", paru chez Odile Jacob.

« Au fil de mes consultations, j’ai fait le constat que les enfants présentent des traits de caractère particuliers selon leur rang de naissance, quels que soient les milieux familiaux et culturels, et le sexe.
Dans la grande majorité des cas, les mères décrivent le cadet comme plus autonome, déluré, extraverti, mais aussi plus déterminé par rapport à un aîné qui serait plus réservé, plus secret, plus angoissé »,
observe-t-il.

Dans la première moitié du XXe siècle, Alfred Adler, disciple de Freud, s’était déjà intéressé à l’influence du rang de naissance sur le devenir des enfants.
« Selon ses observations, l’aîné serait “à la meilleure place”, car ses parents l’amèneraient à croire qu’il est le plus fort, le plus sage et le plus responsable, explique Régine Scelles, professeur des universités et psychologue spécialiste de la fratrie



L’AÎNÉ OCCUPE UNE PLACE À PART
Cet investissement le conduisant à attacher de l’importance à l’autorité, aux traditions, il serait plutôt conservateur et succéderait à son père.
En revanche, le dernier-né risquerait de rester toute sa vie le bébé gâté et timoré de la famille et serait plutôt artiste, ou alors, par un phénomène de surcompensation, il se donnerait pour mission d’être le plus fort de tous et devenir le “sauveur” de sa famille.
Quant aux enfants “du milieu”, ils seraient pris entre le désir de rivaliser avec l’aîné et la peur d’être dépassés par le plus jeune », poursuit la spécialiste.

Si autrefois le premier garçon était privilégié – il héritait du patrimoine, du titre, etc. –, ces traditions ont disparu dans la tourmente de la Révolution avec l’abolition des privilèges.
Pourtant, l’aîné occupe encore une place à part. Ne serait-ce que parce que c’est avec lui que le couple fait ses premiers pas de parents et qu’il devient « famille ».

S’il n’est plus l’unique héritier, et ne porte plus systématiquement le prénom du père, d’autres droits et devoirs lui sont attribués sans être explicitement formulés.
« On demande souvent à l’aîné de montrer l’exemple, on lui attribue des responsabilités morales parfois encombrantes », dit Marc Sznajder.
Les regards parentaux sont concentrés sur lui, dans l’attente de la première dent, du premier pas… jusqu’à celle, angoissée, des résultats du premier bachelier de la fratrie.
Comme le raconte avec humour Marc Sznajder, « pour le premier on se précipite chez le pédiatre au moindre bouton ; pour le deuxième, on prend tranquillement rendez-vous ; pour le troisième, ça se passe au téléphone : “Docteur, Léo a la varicelle, je prends les mêmes produits que pour les grands ?” »



« LES CADETS ONT TOUJOURS L’AÎNÉ EN LIGNE DE MIRE »

L’aîné a-t-il pour autant la place la plus enviable ?
Ce n’est pas l’avis de tous les « grands » ! « On me demande toujours de montrer l’exemple, alors que mes parents passent tout à ma petite sœur. Moi j’aurais voulu avoir un grand frère pour me protéger », dit Mathilde, 14 ans.
Sa position de pionnière est pourtant enviée par sa sœur de 12 ans qui, un jour, a posé à ses parents l’abyssale question, porteuse de tout son « désespoir » de cadette : « Pourquoi vous ne m’avez pas faite en premier ? »

« Les cadets ont toujours l’aîné en ligne de mire, que ce soit pour chercher à lui ressembler ou au contraire tenter de se démarquer de son emprise », observe Marc Sznajder.

Une posture qui explique pourquoi les cadets, obligés de se faire une place au soleil, sont souvent qualifiés de « rebelles ».
Mais dans une famille de deux enfants – la norme aujourd’hui –, le cadet est aussi un petit dernier, qui peut se voir ravir sa place.

« Il existe peu de recherches sur “l’enfant du milieu”, parfois appelé “l’enfant du biberon coincé”, parce que personne n’ayant de temps à lui consacrer, il est contraint de boire son biberon, calé sur un oreiller », ajoute Régine Scelles.



« L’ENFANT DU MILIEU », CONCILIANT ET CONCILIATEUR

Trop jeunes pour obtenir les privilèges de l’aîné, trop vieux pour que leurs « bêtises » soient considérées avec la mansuétude réservée au plus petit, ces enfants sont aussi réputés conciliants et conciliateurs.

Mère de quatre enfants, Évelyne a pu ressentir lors d’un voyage scolaire d’un de ses fils combien ce deuxième enfant joue un rôle « apaisant » dans la fratrie, dépourvue durant cette période d’un discret mais indispensable élément d’équilibre.

« Dans une famille nombreuse, ces enfants “sandwiches” ont parfois du mal à trouver leur place et doivent se battre pour la créer. C’est encore plus difficile lorsque les enfants naissent très rapprochés, car ils ont du mal à se déployer et à se construire une identité », explique Marie-Dominique Linder, psychanalyste.

Notre place dans le monde adulte est-elle pour autant déterminée ainsi ?
S’appuyant sur différents travaux – notamment ceux de Walter Toman, professeur de psychologie aux États-Unis et en Allemagne, de Frank Sulloway, sociologue à l’université de Berkeley – Marc Sznajder observe que parvenus à l’âge adulte, « les aînés ont tendance à réussir leur carrière professionnelle, alors que les cadets semblent se réaliser le mieux au plan personnel : les aînés adhèrent le plus souvent au projet parental, alors que les cadets se conforment résolument à leur propre projet, indépendamment des projections familiales. ».



DEVENU PARENT, CHACUN REDISTRIBUE LES CARTES REÇUES

Tout en reconnaissant une influence sur la personnalité, Régine Scelles relativise.
« D’autres facteurs interviennent. On ne vit pas de la même façon le fait d’être l’aîné de trois filles ou de trois garçons. Ou le cadet d’un frère handicapé, ou celui d’un aîné décédé et dont la mémoire pèse lourd. »

La psychologue souligne qu’il est difficile pour un enfant de ne pas jouer le rôle que les parents et la société attendent implicitement de lui.
« Si un cadet se montre très responsable, l’aîné peut se sentir spolié et ressentir une forme de blessure sociale », explique-t-elle.

Devenu parent, chacun redistribue les cartes reçues.
Bruno, 48 ans, aîné d’une famille de quatre, a veillé à ne pas transmettre à son premier fils le rôle de « chef de famille bis » qui lui avait été attribué.
De son côté, Anne, 39 ans, cadette de trois enfants et longtemps sous la coupe de son grand frère, reconnaît « prendre facilement la défense des deux plus jeunes ».

« Soit on demande à ses enfants de rejouer quelque chose que l’on a vécu pour le réparer, soit notre expérience nous apparaît tellement positive que l’on demandera que rien ne soit modifié. Ou encore, nous serons en mesure de proposer un modèle de fraternité, mais en laissant nos enfants libres de tisser leurs liens fraternels à leur guise », explique Régine Scelles.
Une diversité de modèles qui incite chaque enfant à puiser en lui les ressources nécessaires pour trouver sa place dans sa famille, puis dans un monde qu’il lui reste à découvrir.

MARIE AUFFRET-PERICONE pour le journal La Croix



Allez, au plaisir de vous lire ... ENJOY !
 

 

 

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